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Architecture vernaculaire : utilisation fonctionnelle de l’espace
Le plan de la maison traditionnelle obéit à des règles strictes de structuration de l’espace. Quel que soit le type de maison examiné, on y découvre toujours un système d’oppositions qui régit son aménagement. Les croyances et les règles de vie lao ont des implications architecturales directes qui permettent d’expliquer la configuration de l’habitat.
Règles de structuration de l’espace
1) Direction et sens
Une règle absolue impose que la direction du corps pendant le sommeil soit perpendiculaire à la ligne de faîte du toit de la maison, cette ligne de faîte étant elle-même impérativement parallèle au cours de la rivière. Si la direction du corps est impérative, on doit aussi respecter une orientation précise. Ainsi la tête du dormeur doit être placée contre la paroi opposée à celle près de laquelle on circule dans la chambre, et plus généralement vers la zone de circulation de l’ensemble de l’habitation. Les pieds ne peuvent être, même momentanément, au-dessus de la tête de quelqu’un qui dort.
Cette opposition doit être rapprochée de l’obligation d’orienter la poutre faîtière de l’habitation parallèlement au courant, dormir perpendiculairement à cette poutre revient à dormir perpendiculairement à la rivière. Mais à côté de cette règle, une tradition associe la direction de la tête du dormeur à celle du Levant, de l’Est ; le "soleil qui tombe" ou l’Ouest étant considéré comme la direction de l’ombre, de la fin de la vie, de l’ombre.
Les endroits où dorment les vivants sont parfaitement déterminés. L’endroit où dort la famille détermine la partie intime de la maison, par opposition aux lieux de réception et de circulation et aux lieux de service. La maison Lao s’articule autour de deux pôles : la partie fermée, ou intime, de la maison, et la partie ouverte. C’est dans la partie intime de la maison qu’ont lieu les rites privés de la famille, à savoir, la naissance, le mariage et la mort.
2) L’orientation des morts
La direction que l’on doit donner aux morts est parallèle à la ligne de faîte de la toiture, donc parallèle au cours d’eau et perpendiculaire à celle des vivants pendant leur sommeil. Le corps tourné parallèlement à la poutre faîtière, est mis dans la zone qui en temps normal sert de "salle" à la famille dans la partie intime, ou de circulation au pied des couches. A Louang Prabang, les pieds du défunt sont dirigés vers le haan. On estime que le corps du mort doit être sorti "les pieds devant" et par la façade. Le corps est placé en face de la porte qui fait communiquer la chambre et le haan, il est ensuite transporté toujours longitudinalement sans reprendre la position transversale qui est celle des vivants.
3) Les déplacements
A chaque fois qu’il y a changement de lieu, franchissement d’une frontière entre deux espaces, il y a changement de direction suivant un angle droit. De règle générale, les Lao évitent les cheminements en ligne droite ; Deux maisons côte à côte dans une même rue, ou deux maisons se faisant face de chaque côté d’un chemin ne pourront avoir leur porte d’entrée et donc leur escalier, dans le même axe. Ils devront être légèrement décalés par rapport aux voisins. Ces règles semblent se justifier par un besoin de protection, d’intimité et de discrétion. Devoir tourner à angle droit chaque fois que l’on pénètre dans un lieu nouveau invite celui qui ne peut aller plus loin à ne pas porter son regard vers l’intérieur.
Par ailleurs, les Lao évoquent le besoin de se protéger des esprits qui se déplacent en ligne droite : tourner à chaque déplacement est le moyen de créer des obstacles à leur cheminement.
4) Les matériaux
L’ossature de ces maisons traditionnelles est faite de poteaux porteurs, les parois de matériaux légers, torchis ou planche de bois. Le bois a une grande valeur symbolique au Laos, il est lié aux esprits et aux divinités. Les constructions éphémères des champs et celles des modestes villageois sont en bambou, un matériau léger, doté de nombreuses qualités et qui peut se travailler presque seul. Le bois est plus durable et plus cher, il nécessite un volume de travail, une entraide ou une mobilisation de main d’œuvre beaucoup plus importants pour les différentes opérations de construction.
Une grande différence existait autrefois entre les maisons riches en bois appartenant à l’aristocratie et aux marchands, et les maisons plus pauvres en bambou. Jusqu’il y a quelques décennies, certains bois précieux, comme le teck, étaient propriété du roi.
Les incendies, les insectes, l’humidité et le goût de la modernité ont été fatals à beaucoup de ces maisons.
5) Evolution de l’architecture vernaculaire
L’installation à Louang Prabang d’immigrés chinois et vietnamiens, ainsi que la présence française transforment la physionomie de la ville sans véritablement la bouleverser. L’architecture traditionnelle lao va intégrer ces apports extérieurs tant au niveau constructif, que fonctionnel. Un véritable échange va se créer entre l’architecture locale et l’architecture importée. L’habitation lao va ainsi assimiler de nouvelles méthodes de construction.
Les matériaux légers vont progressivement céder la place aux maçonneries jusque là réservées à la construction des vats. Il faut également noter l’occupation du rez-de-chaussée, absente dans l’architecture traditionnelle. Des murs maçonnés sont construits entre les pilotis et contreventent ainsi la base des poteaux qui n’ont plus besoin d’être enfoncés dans le sol.
Remplaçant progressivement le bois ou les tressages de bambou, la maçonnerie est employée pour ces parois basses comme signe de prospérité, pour le confort thermique de la forte inertie donnée par les murs et pour contreventer une structure ancienne fatiguée. L’étage est en bois, il contient un avant corps en porte-à-faux, couvert par deux versants. A côté, un balcon est couvert par un appentis peu pentu. Jusque là on peut parler d’une véritable assimilation des apports extérieurs, qui s’est faite en parfaite adéquation avec les modes d’habiter traditionnels lao.
L’architecture va subir d’autres évolutions, mais celles-là moins respectueuses des règles de vie lao. Aujourd’hui on assiste en effet à l’apparition d’une architecture dont les exemplaires les plus coûteux se caractérisent par l’emploi du béton en remplacement du bois pour la structure de l’édifice et par la multiplication des volumes et des couvertures à base de tuiles de ciment ou de tôles ondulées peintes en vert ou en rouge.
L’abondance des décors très éclectiques est parfois excessive, balustres, grille en fer forgé, lambrequins en série... Une peinture blanche couvre les parois, les menuiseries en bois précieux n’étant pas peintes mais vernies. Enfin le terrain libre de la parcelle est souvent cimenté alors que les clôtures sont de plus en plus souvent construites en dur.
Au titre du patrimoine, cette dérive formelle correspond à ne dérive fonctionnelle. Alors que les maisons traditionnelles étaient adaptées aux contraintes climatiques et répondaient aux exigences culturelles, les derniers modèles architecturaux témoignent d’une rupture avec les usages traditionnels. Il est indispensable de protéger les habitations en accord avec les modes d’habiter et qui ne rompent pas de façon trop brutale avec le paysage urbain existant. C’est la raison pour laquelle il a été convenu de ne pas favoriser la reproduction de ces architectures.